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Par Stéphanie le 14 Juillet 2011 à 12:19
Magotine avait pour général le fameux Polichinelle, qui savait bien son métier, et qui avait un gros corps de réserve, composé de mouches guêpes, de hannetons et de papillons, qui firent merveilles contre quelques grenouilles et quelques lézards armés à la légère. Ils étaient depuis longtemps à la solde des pagodes, à la vérité plus redoutables par leur nom que par leur valeur.
Magotine se divertit quelque temps à voir le combat, pagodes et pagodines s'y surpassèrent: mais la fée d'un coup de baguette dissipa tous ces superbes édifices: ces charmants jardins, ces bois, ces prés, ces fontaines furent ensevelis sous leurs propres ruines, et la reine Laideronnette ne put éviter la dure condition d'être esclave de la plus maligne fée qui sera jamais, quatre ou cinq cents marionnettes l'obligèrent de venir jusqu'où était Magotine. «Madame, lui dit Polichinelle, voici la reine des pagodes, que j'ose vous présenter. - Je la connais il y a longtemps, dit Magotine: elle est cause que je reçus un affront le jour de sa naissance, je ne l'oublierai jamais. - Hélas ! madame, lui dit la reine, je croyais que vous vous en étiez suffisamment vengée, le don de laideur que vous me distribuâtes au suprême degré, pourrait avoir satisfait une personne moins vindicative que vous. - Comme elle cause, dit la fée, voici un docteur de nouvelle édition, votre premier emploi sera d'enseigner la philosophie à mes fourmis, préparez-vous à leur donner tous les jours une leçon. - Comment m'y prendrai-je, madame, répliqua la reine affligée, je ne sais point la philosophie, et quand je la saurais, vos fourmis sont-elles capables de l'apprendre? - Voyez, voyez cette raisonneuse. s'écria Magotine: hé bien !reine, vous ne leur apprendrez pas la philosophie; mais vous donnerez à tout le monde, malgré vous, des exemples de patience qu'il sera difficile d'imiter.»
Là-dessus elle lui fit apporter des souliers de fer si étroits, que la moitié de son pied n'y pouvait entrer; mais cependant il fallut bien les chausser, cette pauvre reine eut tout le temps de pleurer et de souffrir: «Oh çà ! dit Magotine, voici une quenouille chargée de toile d'araignée, je prétends que vous la filiez aussi fine que vos cheveux, et je ne vous donne que deux heures. - Je n'ai jamais filé, madame, lui dit la reine, mais encore que ce que vous voulez me paraisse impossible, je vais essayer de vous obéir.» On la conduisit aussitôt dans le fond d'une grotte très obscure, on la ferma avec une grosse pierre, après lui avoir donné un pain bis et une cruche d'eau.
Lorsqu'elle voulut filer cette crasseuse toile d'araignée, son fuseau trop pesant tombait cent et cent fois en terre, elle eut la patience de le ramasser autant, et de recommencer l'ouvrage à plusieurs reprises; mais c'était toujours inutilement. «Je connais bien à cette heure, dit-elle, l'excès de mon malheur, je suis livrée à l'implacable Magotine; elle n'est pas contente de m'avoir dérobé toute ma beauté, elle veut trouver des prétextes pour me faire mourir.» Elle se prit à pleurer, repassant dans son esprit l'état heureux dont elle venait de jouir dans le royaume de Pagodie, et jetant sa quenouille par terre : « Que Magotine vienne quand il lui plaira, dit-elle, je ne sais point faire l'impossible.» Elle entendit une voix qui lui dit: « Ah ! reine, votre curiosité trop indiscrète vous coûte les larmes que vous répandez: cependant il n'y a pas moyen de voir souffrir ce que l'on aime, j'ai une amie dont je ne vous ai point encore parlé, elle se nomme fée Protectrice, j'espère qu'elle vous sera d'un grand secours.» Aussitôt on frappa trois coups, et sans qu'elle vît personne, sa quenouille fut filée et dévidée. Au bout des deux heures, Magotine, qui cherchait noise, fit ôter la pierre de la grotte, et elle y entra suivie d'un nombreux cortège de marionnettes: «Voyons, voyons, dit-elle, l'ouvrage dune paresseuse qui ne sait ni coudre ni filer. - Madame, dit la reine, je ne le savais pas en effet, mais il a bien fallu l'apprendre.» Quand Magotine vit une chose si étrange, elle prit le peloton de fil d'araignée, et lui dit: «Vraiment, vous êtes trop adroite, ce serait grand dommage de ne vous pas occuper: tenez, reine, faites des filets avec ce fil, qui soient assez forts pour prendre des saumons. - Hé ! de grâce, répliqua-t-elle, considérez qu'à peine les mouches s'y peuvent prendre. - Vous raisonnez beaucoup, ma belle amie, dit Magotine, mais cela ne vous servira de rien.» Elle sortit de la grotte, fit remettre la grosse pierre devant, et l'assura que si dans deux heures, les filets n'étaient pas achevés, elle était perdue.
« Ah ! fée Protectrice, dit alors la reine, s'il est vrai que mes malheurs puissent vous toucher, ne me refusez pas votre secours.» En même temps les filets se trouvent commencés et achevés. Laideronnette demeura surprise au dernier point, elle remercia dans son cœur cette secourable fée qui lui faisait tant de bien, et elle pensa avec plaisir que c'était sans doute son mari qui lui procurait cette amie. « Hélas ! Serpentin Vert, dit-elle, vous êtes bien généreux de m'aimer encore après les maux que je vous ai faits.» On ne lui répondit rien, car Magotine entra, et fut bien étonnée de trouver les filets si industrieusement travaillés, qu'une main ordinaire n'était pas capable de faire un tel ouvrage. « Quoi ! lui dit-elle, auriez-vous la hardiesse de me soutenir que c'est vous qui avez tissé ces filets? - Je n'ai aucun ai-ni à votre Cour, madame, lui dit la reine, et quand j'y en aurais, je suis si bien enfermée qu'il serait difficile qu'on me pût parler sans votre permission. - Puisque vous êtes si habile et si adroite, dit Magotine, vous me serez fort utile dans mon royaume.»
Elle ordonna aussitôt que l'on appareillât ses vaisseaux, et que toutes les marionnettes fussent prêtes à partir; elle fit attacher la reine avec de grosses chaînes de fer, crainte que par quelque mouvement de désespoir, elle ne se jetât dans la mer. Cette princesse infortunée déplorait pendant une nuit sa triste destinée, lorsqu'elle aperçut à la clarté des étoiles Serpentin Vert, qui s'approchait doucement du vaisseau. «Je crains toujours de vous faire peur, lui dit-il, et malgré les raisons que j'ai de ne vous point ménager, vous m'êtes infiniment chère. - Pouvez-vous nie pardonner mon indiscrète curiosité? répliqua-t-elle, et puis-je vous dire sans vous déplaire:
Est-ce vous, Serpentin, cher amant, est-ce vous?
Puis-je revoir l'objet pour qui mon cœur soupire,
Quoi ! je puis vous revoir, mon cher et tendre époux
O Ciel ! que j'ai souffert un rigoureux martyre, Que j'ai souffert, hélas!
En ne vous voyant pas !
Serpentin répliqua par ces vers:
Que les douleurs de l'absence
Troublent les cours amoureux.
Dans le royaume affreux,
Où les dieux irrités exercent leur vengeance !
On ne saurait souffrir de maux plus rigoureux, Que les douleurs de l 'absence.
Magotine n'était pas de ces fées qui dorment quelquefois, l'envie de mal l'aire la tenait toujours éveillée, elle ne manqua pas d'entendre la conversation du roi Serpentin et de son épouse : elle vint l'interrompre comme une furie: «Ah ! ah !dit-elle, vous vous mêlez de rimer, et de vous plaindre sur le ton de Phébus; vraiment, j'en suis bien aise. Proserpine, qui est ma meilleure amie, m'a priée de lui donner quelque poète à ses gages; ce n'est pas qu'elle en manque, mais elle en veut encore. Allons, Serpentin Vert, je vous ordonne, pour achever votre pénitence, d'aller au sombre manoir et de faire mes compliments à la gentille Proserpine.» L'infortuné Serpentin partit aussitôt avec de longs sifflements, il laissa la reine dans la plus vive douleur; elle crut qu'elle n'avait plus rien à ménager, dans son transport elle s'écria: «Par quel crime t'avons-nous déplu, barbare Magotine ! J'étais à peine au monde que ton infernale malédiction m'ôta ma beauté, et me rendit affreuse: peux-tu dire que j'étais coupable de quelque chose, puisque je n'avais point encore l'usage de la raison, et que je ne me connaissais pas moi-même? Je suis certaine que le malheureux roi que tu viens d'envoyer aux Enfers est aussi innocent que je l'étais: mais achève, fais-moi promptement mourir: c'est la seule grâce que je te demande. - Tu serais trop contente, lui dit Magotine, si je t'accordais ta prière, il faut auparavant que tu puises de l'eau dans la Source sans fond.»
Dès que les vaisseaux furent arrivés au royaume des marionnettes, la cruelle Magotine prit une meule de moulin: elle l'attacha au cou de la reine, et lui commanda de monter avec jusqu'au sommet d'une montagne qui était fort au-dessus des nuées; que lorsqu'elle y serait, elle cueillît du trèfle à quatre feuilles, qu'elle en emplît sa corbeille, et qu'ensuite elle descendît jusqu'au fond de la vallée, pour y puiser dans une cruche percée l'Eau de Discrétion, et qu'elle lui en apportât assez pour remplir son grand verre. La reine lui dit qu'il était impossible qu'elle pût obéir; que la meule de moulin était dix fois plus pesante qu'elle; que la cruche percée ne pourrait jamais retenir l'eau qu'elle voulait boire, et qu'elle ne pouvait pas se résoudre à entreprendre une chose si impossible. « Si tu y manques, lui dit Magotine, assure-toi que ton Serpentin Vert en souffrira.» Cette menace causa tant de frayeur à la reine, que sans examiner sa faiblesse, elle essaya de marcher, mais hélas ! ç'aurait été bien inutilement, si la fée Protectrice, qu'elle appela, ne fût venue à son secours. «Voilà, lui dit-elle en l'abordant, le juste paiement de votre fatale curiosité, ne vous plaignez qu'à vous-même de l'état où Magotine vous réduit.» Aussitôt elle la transporta sur la montagne et lui mit du trèfle à quatre feuilles dans sa corbeille, malgré les monstres affreux qui le gardaient, et qui firent pour le défendre des efforts surnaturels: mais d'un coup de baguette, la fée Protectrice les rendit plus doux que des agneaux.
Elle n'attendit pas que la reine reconnaissante l'eût remerciée pour achever de lui faire tout le plaisir qui dépendait d'elle. Elle lui donna un petit chariot traîné par deux serins blancs, qui parlaient et qui sifflaient à merveille; elle lui dit de descendre la montagne, de jeter ses souliers de fer contre deux géants armés de massues qui gardaient la fontaine, qu'ils tomberaient sans aucun sentiment: qu'elle donnât sa cruche aux petits serins, qu'ils trouveraient bien le moyen de l'emplir de l'Eau de Discrétion; qu'aussitôt qu'elle en aurait, elle s'en frottât le visage, et qu'elle deviendrait la plus belle personne du monde; qu'elle lui conseillait encore de ne point rester à la fontaine, de ne pas remonter sur la montagne; mais de s'arrêter dans un petit bois très agréable, qu'elle trouverait sur son chemin; qu'elle pouvait y passer trois ans, que Magotine croirait toujours qu'elle serait occupée à puiser de l'eau dans sa cruche, ou que les autres périls du voyage l'auraient fait mourir.
La reine embrassa les genoux de la fée Protectrice, elle la remercia cent fois des faveurs particulières qu'elle en recevait: « Mais, ajouta-t-elle, madame, les heureux succès que je dois avoir, ni la beauté que vous me promettez, ne sauraient me toucher de joie jusqu'à ce que Serpentin soit déserpentiné. - C'est ce qui arrivera, après que vous aurez été trois ans au bois de la montagne, lui dit la fée, et qu'à votre retour vous aurez donné l'eau dans la cruche percée, et le trèfle à Magotine.»
La reine promit à la fée Protectrice de ne manquer à rien de tout ce qu'elle lui prescrivait. «Cependant, madame, ajouta-t-elle, serai-je trois ans sans entendre parler du roi Serpentin? - Vous mériteriez d'être tout le temps de votre vie privée de ses nouvelles, répondit la fée; car se peut-il rien de plus terrible que de réduire comme vous avez fait ce pauvre roi à recommencer sa pénitence?» La reine ne répondit rien, les larmes qui coulaient de ses yeux et son silence marquaient assez la douleur qu'elle ressentait. Elle monta dans le petit chariot, les serins de Canaries firent leur devoir et la conduisirent au fond de la vallée, où les géants gardaient la Fontaine de Discrétion. Elle prit promptement ses souliers de fer qu'elle leur jeta à la tête; dès qu'ils en furent touchés, ils tombèrent comme des colosses sans vie: les serins prirent la cruche percée, et la raccommodèrent avec une adresse si surprenante qu'il ne paraissait pas qu'elle eût jamais été cassée; le nom que cette eau portait lui donna envie d'en boire: « Elle me rendra, dit-elle, plus prudente, et plus discrète que par le passé: hélas ! si j'avais eu ces qualités, je serais encore dans le royaume de Pagodie.» Après qu'elle eut bu un long trait, elle se lava le visage, et devint si belle, si belle, qu'on l'aurait plutôt prise pour une déesse, que pour une personne mortelle.
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Par Stéphanie le 14 Juillet 2011 à 12:19
Quand elle était seule, la voix lui parlait: elle en avait quelquefois peur, mais elle lui faisait quelquefois plaisir; car il n'y avait rien de si galant que tout ce qu'elle lui disait. «Quelque résolution que j'aie faite de ne jamais aimer, répondait la princesse, et quelque raison que j'aie de défendre mon cœur d'un engagement qui ne lui pourrait être que fatal, je vous avoue cependant que je serais bien aise de connaître un roi dont le goût est aussi bizarre que le vôtre: car s'il est vrai que vous m'aimiez, vous êtes peut-être le seul dans le monde, qui puissiez avoir une semblable faiblesse pour une personne aussi laide que moi. - Pensez tout ce qu'il vous plaira de mon caractère, mon adorable princesse, lui répondait la voix, je trouve assez de quoi le justifier dans votre mérite, ce n'est pas cela aussi ce qui m'oblige à me cacher, j'en ai des sujets si tristes que si vous les saviez, vous ne pourriez nie refuser votre pitié.» La princesse alors pressait la voix de s'expliquer; mais la voix ne parlait plus, elle entendait seulement pousser de longs soupirs; toutes ces choses l'inquiétaient, et quoique ce fût un amant inconnu et caché, il lui rendait mille soins, à joindre que le lieu où elle était lui faisait souhaiter une compagnie plus convenable que celle des pagodes. Cela fut cause qu'elle commença de s'ennuyer partout, la voix seule de son invisible avait le pouvoir de l'occuper agréablement.
Une des nuits la plus obscure de l'année, où elle s'était endormie, elle s'aperçut en se réveillant que quelqu'un était assis proche de son lit; elle crut que c'était la pagodine de perles, qui, ayant plus d'esprit que les autres, venait quelquefois l'entretenir. La princesse avança le bras pour la prendre; mais on lui prit la main, on la serra, on la baisa, quelques larmes tombèrent dessus, on était si saisi qu'on ne pouvait parler; elle ne douta point que ce ne fût le roi invisible: « Que me voulez-vous donc, lui dit-elle en soupirant, puis-je vous aimer sans vous connaître et sans vous voir? - Ah ! madame, répondit-on, quelles conditions attachez-vous à la douceur de vous plaire? Il m'est impossible de me laisser voir. La méchante Magotine, qui vous a joué un si mauvais tour, est la même qui m'a condamné à une pénitence de sept ans, il y en a déjà cinq d'écoulés, il m'en reste encore deux, dont vous adoucirez toute l'amertume si vous voulez bien me recevoir pour époux; vous allez penser que je suis un téméraire, et que ce que je vous demande est absolument impossible: mais, madame, si vous saviez jusqu'où va ma passion, jusqu'où va l'excès de mes malheurs, vous ne refuseriez point la grâce que je vous demande.»
Laideronnette s'ennuyait, comme je l'ai déjà dit, elle trouvait que le roi invisible avait tout ce qui pouvait plaire dans l'esprit, et l'amour se saisit de son cœur, sous le nom spécieux d'une généreuse pitié. Elle répliqua qu'il fallait encore quelques jours pour se pouvoir résoudre: c'était beaucoup de l'avoir amenée jusqu'à ne différer que de quelques jours une chose dont on n'osait se flatter: les fêtes et les concerts redoublèrent, on ne chantait plus devant elle que les chants d'hyménée: on lui apportait sans cesse des présents d'une magnificence qui surpassait tout ce que l'on avait jamais vu; l'amoureuse voix, assidue auprès d'elle, lui faisait sa cour dès qu'il était nuit, et la princesse se retirait de meilleure heure, pour avoir plus de temps à l'entretenir.
Enfin elle consentit de prendre le roi invisible pour époux, et elle lui promit de ne le voir qu'après que sa pénitence serait achevée. « Il y va de tout pour vous et pour moi, lui dit-il: si vous aviez cette imprudente curiosité, il faudrait que je recommençasse ma pénitence, et que vous en partageassiez la peine avec moi; mais si vous pouvez vous empêcher de suivre les mauvais conseils qu'on vous donnera, vous aurez la satisfaction de me trouver selon votre cœur, et de retrouver en même temps la merveilleuse beauté que la méchante Magotine vous a ôtée.» La princesse ravie de cette nouvelle espérance fit mille serments à son époux de n'avoir aucune curiosité contraire à ses désirs; ainsi les noces s'achevèrent sans bruit et sans éclat, le cœur et l'esprit n'y trouvèrent pas moins leur compte.
Comme tous les pagodes cherchaient avec empressement à divertir leur nouvelle reine, il y en eut un qui lui apporta l'histoire de Psyché, qu'un auteur des plus à la mode venait de mettre en beau langage: elle y trouva beaucoup de choses qui avaient du rapport à son aventure, et il lui prit une si violente envie de voir chez elle son père et sa mère, avec sa sueur et son beau-frère, que quelque chose au monde que pût lui dire le roi, rien ne fut capable de lui ôter cette fantaisie. « Le livre que vous lisez, ajouta-t-il, vous peut faire connaître dans quels malheurs Psyché tomba. Hé ! de grâce, profitez-en pour les éviter.» Elle promit plus qu'il ne lui demandait; enfin un vaisseau chargé de pagodes et de présents magnifiques fut dépêché avec des lettres de la reine Laideronnette à la reine sa mère. Elle la conjurait de la venir voir dans son royaume, et les pagodes eurent pour cette fois seulement la permission de parler ailleurs que chez eux.
La perte de la princesse n'avait pas laissé que de trouver de la sensibilité dans ses proches, on la croyait périe, de sorte que ses lettres furent infiniment agréables à la Cour; et la reine, qui mourait d'envie de la revoir, ne résista pas un moment à partir avec sa fille et son gendre. Les pagodes, qui savaient seuls le chemin du royaume, y conduisirent toute la famille royale, et lorsque Laideronnette vit ses parents, elle pensa mourir de joie; elle lut et relut Psyché pour être en garde sur tout ce qu'on lui dirait, et sur tout ce qu'elle devait répondre: mais elle eut beau faire, elle s'égara en cent endroits: tantôt le roi était à l'armée, tantôt il était malade et de si mauvaise humeur qu'il ne voulait voir personne, tantôt il faisait un pèlerinage, puis il était à la chasse ou à la pêche. Enfin il semblait qu'elle était gagée pour ne rien dire qui vaille, et que la barbare Magotine lui avait renversé l'esprit. Sa mère et sa sueur en raisonnèrent ensemble; il fut conclu qu'elle les trompait, et que peut-être elle se trompait elle-même, de sorte que par un zèle assez mal réglé, elles résolurent de lui parler: elles s'en acquittèrent avec tant d'adresse qu'elles jetèrent dans son esprit mille craintes et mille doutes; après s'être longtemps défendue de convenir de ce qu'elles lui disaient, elle avoua que jusqu'alors, elle n'avait point vu son époux, mais qu'il avait tant de charmes dans sa conversation que c'était assez de l'entendre pour être contente, qu'il était en pénitence encore pour deux ans, et qu'après ce temps là, non seulement elle devait le voir, mais qu'elle deviendrait belle comme l'astre du jour. «Ah! malheureuse, s'écria la reine, que les panneaux qu'on te tend sont grossiers ! Est-il possible que tu croies avec une si grande simplicité de tels contes ? Ton mari est un monstre, et cela ne peut être autrement, car tous les pagodes dont il est le roi sont de vrais magots. - Je croirais bien plutôt, répliqua Laideronnette, que c'est le dieu d'Amour lui-même. - Quelle erreur ! s'écria la reine Bellotte, l'on dit à Psyché qu'elle avait un monstre pour époux, et elle trouva que c'était l'Amour: vous êtes entêtée que l'Amour est le vôtre, et assurément c'est un monstre; tout au moins mettez votre esprit en repos, éclaircissez-vous sur une chose si aisée.» La reine en dit autant, et son gendre encore davantage.
La pauvre princesse demeura si confuse et si troublée, qu'après avoir renvoyé toute sa famille avec des présents qui payaient de reste le taffetas zinzolin et le ruban de manchon, elle résolut, quoiqu'il en pût arriver, de voir son mari. Ah! curiosité fatale, dont mille affreux exemples ne peuvent nous corriger, que tu vas coûter cher à cette malheureuse princesse ! Elle aurait eu bien du regret de ne pas imiter sa devancière Psyché, de sorte qu'elle cacha une lampe comme elle, et s'en servit pour regarder ce roi invisible, si cher à son cœur. Mais quel cri épouvantable ne fit-elle pas, lorsqu'au lieu du tendre Amour blond, blanc, jeune et tout aimable, elle vit l'affreux Serpentin Vert aux longs crins hérissés? Il s'éveilla transporté de rage et de désespoir: « Barbare, s'écria-t-il, est-ce là la récompense de tant d'amour?» La princesse ne l'entendait plus, la peur l'avait fait évanouir, et Serpentin était déjà bien loin.
Au bruit de toute cette tragédie, quelques pagodes étaient accourus; ils couchèrent la princesse, ils la secoururent, et lorsqu'elle fut revenue, elle se trouva dans un état où l'imagination ne peut atteindre; combien se reprochait-elle le mal qu'elle allait procurer à son mari? Elle l'aimait tendrement, mais elle abhorrait sa figure, et elle aurait voulu pour la moitié de sa vie ne l'avoir pas vu.
Cependant ses tristes rêveries furent interrompues par quelques pagodes, qui entrèrent d'un air effrayé dans sa chambre; ils venaient l'avertir que plusieurs vaisseaux remplis de marionnettes, ayant Magotine à leur tête, étaient entrés sans obstacle dans le port. Les marionnettes et les pagodes sont ennemis de tout temps: ils sont en concurrence sur mille choses, et les marionnettes ont même le privilège de parler partout, ce que les pagodes n'ont point. Magotine était leur reine, l'aversion qu'elle avait pour le pauvre Serpentin Vert et pour l'infortunée Laideronnette l'obligea d'assembler des troupes, dans la résolution de les venir tourmenter au moment que leurs douleurs seraient les plus vives.
Elle n'eut pas de peine à réussir dans ses projets, car la reine était si désolée, qu'encore qu'on la pressât de donner les ordres nécessaires, elle s'en défendit, assurant qu'elle n'entendait point la guerre: l'on assembla par son ordre les pagodes qui s'étaient trouvés dans des villes assiégées et dans le cabinet des plus grands capitaines, elle leur ordonna de pourvoir à toutes choses et s'enferma ensuite dans son cabinet, regardant d'un œil presque égal tous les événements de la vie.
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Par Stéphanie le 14 Juillet 2011 à 12:18
De quelque côté qu'elle pût jeter les yeux, elle ne vit rien qui adoucît son désespoir, la nuit s'approchait, elle n'avait aucune provision pour manger, et ne savait où se retirer : « Je croyais, dit-elle, tristement finir mes jours dans la mer; sans doute c'est ici leur dernière période, quelque monstre marin viendra me dévorer, ou le manque de nourriture m'ôtera la vie.» Elle s'assit au plus haut du rocher; tant qu'il fit jour elle regarda la mer, et lorsque la nuit fut tout à fait venue, elle ôta sa jupe de taffetas zinzolin dont elle se couvrit la tête et le visage, puis elle resta ainsi, bien inquiète de ce qui s'allait passer.
Enfin elle s'endormit, et il lui sembla qu'elle entendait divers instruments; elle demeura persuadée qu'elle rêvait; mais au bout d'un moment, elle entendit chanter ces vers, qui semblaient faits pour elle:
Souffrez qu'ici l'Amour vous blesse,
L'on y ressent ses tendres feux,
Ce dieu bannit notre tristesse,
Nous nous plaisons dans ce séjour heureux. Souffrez qu'ici l'Amour vous blesse,
L'on y ressent ses tendres feux.
L'attention qu'elle fit à ces paroles la réveilla tout à fait: «De quel bonheur et de quelle infortune suis-je menacée, dit-elle, en l'état où je suis, reste-t-il encore de beaux jours ?» Elle ouvrit les yeux avec quelque sorte de crainte, appréhendant de se trouver environnée de monstres; mais quelle fut sa surprise, lorsqu'au lieu de ce rocher affreux et sauvage, elle se trouva dans une chambre toute lambrissée d'or, le lit où elle était couchée répondait parfaitement à la magnificence du plus beau palais de l'univers : elle se faisait là-dessus cent questions, ne pouvant croire qu'elle fût bien éveillée. Enfin elle se leva, et courut ouvrir une porte vitrée qui donnait sur un spacieux balcon, d'où elle découvrit toutes les beautés que la nature, secondée de l'art, peut ménager sur la terre: des jardins remplis de fleurs, de fontaines, de statues et d'arbres rares, des forêts en éloignement, des palais dont les murs étaient ornés de pierreries, les toits de perles, si merveilleusement faits que c'étaient autant de chefs-d’œuvre; une mer douce et paisible, couverte de mille sorte de bâtiments différents, dont les voiles, les banderoles et les flammes agitées par les vents, faisaient l'effet du monde le plus agréable à la vue.
«Dieux ! justes dieux, s'écria-t-elle, que vois-je, où suis-je? Quelle surprenante métamorphose, qu'est donc devenu cet épouvantable rocher, qui semblait menacer les cieux de ses pointes sourcilleuses? Est-ce moi qui péris hier dans une barque, et qui fut sauvée par le secours d'un serpent?» Elle parlait ainsi, elle se promenait, elle s'arrêtait; enfin elle entendit quelque bruit dans son appartement, elle y entra, et vit venir à elle cent pagodes vêtus et faits de cent manières différentes; les plus grands avaient une coudée de haut, et les plus petits n'avaient pas plus de quatre doigts; les uns beaux, gracieux, agréables; les autres hideux, et d'une laideur effrayante : ils étaient de diamants, d'émeraudes, de rubis, de perle, de cristal, d'ambre, de corail, de porcelaine, d'or, d'argent, d'airain, de bronze, de fer, de bois, de terre: les uns sans bras, les autres sans pieds, des bouches à l'oreille, des yeux de travers, des nez écrasés: en un mot il n'y a pas plus de différence entre les créatures qui habitent le monde, qu'il y en avait entre ces pagodes.
Ceux qui se présentèrent devant la princesse étaient les députés du royaume; après lui avoir fait une harangue, mêlée de quelques réflexions très judicieuses, ils lui dirent pour la divertir que depuis quelque temps ils voyageaient dans le monde, mais que pour en obtenir la permission de leur souverain, ils lui faisaient serment, en partant, de ne point parler; qu'il y en avait même de si scrupuleux qu'ils ne voulaient remuer ni la tête, ni les pieds, ni les mains: mais que cependant la plupart ne pouvaient s'en empêcher, qu'ils couraient ainsi l'univers, et que lorsqu'ils étaient de retour, ils réjouissaient leur roi par le récit de tout ce qui se passait de plus secret dans les différentes Cours où ils étaient reçus. «C'est, madame, ajoutèrent ces députés, un plaisir que nous vous donnerons quelquefois, car nous avons ordre de ne rien oublier pour vous désennuyer: au lieu de vous apporter des présents, nous venons vous divertir par nos chansons et par nos danses.» Ils se mirent aussitôt à chanter ces paroles, en dansant en danse ronde, avec des tambours de basque et des castagnettes:
Les plaisirs sont charmants,
Lorsqu'ils suivent les peines,
Les plaisirs sont charmants
Après de longs tourments:
Ne brisez point vos chaînes
Jeunes amants.
Les plaisirs sont charmants.
Lorsqu'ils suivent les peines,
Les plaisirs sont charmants
Après de longs tourments.
A force de souffrir des rigueurs inhumaines,
Vous trouverez d'heureux moments.
Les plaisirs sont charmants,
Lorsqu'ils suivent les peines,
Les plaisirs sont charmants
Après de longs tourments.
Lorsqu'ils eurent fini, le député qui avait porté la parole dit à la princesse: «Voici, madame, cent pagodines, qui sont destinées à l'honneur de vous servir, tout ce que vous voudrez au monde s'accomplira, pourvu que vous restiez parmi nous.» Les pagodines parurent à leur tour; elles tenaient des corbeilles proportionnées à leur taille, remplies de cent choses différentes si jolies, si utiles, si bien faites et si riches, que Laideronnette ne se lassait point d'admirer, de louer, et de se récrier sur les merveilles qu'elle voyait. La plus apparente des pagodines, qui était une petite figure de diamants, lui proposa d'entrer dans la grotte des bains, parce que la chaleur augmentait; la princesse marcha du côté qu'elle lui montrait, entre deux rangs de gardes du corps d'une taille et d'une mine à faire mourir de rire; elle trouva deux cuves de cristal garnies d'or, pleines d'eau d'une odeur si bonne et si rare qu'elle en demeura surprise, un pavillon de drap d'or, mêlé de vert s'élevait au-dessus; elle demanda pourquoi il y avait deux cuves, on lui dit que l'une était pour elle, et l'autre pour le souverain des pagodes. «Mais, s'écria-t-elle, en quel endroit est-il?- Madame, lui dit-on, il fait à présent la guerre, vous le verrez à son retour.» La princesse demanda encore s'il était marié: on lui dit que non, et qu'il était si aimable, qu'il n'avait trouvé jusqu’alors personne digne de lui. Elle ne poussa pas plus loin sa curiosité, elle se déshabilla, et se mit dans le bain. Aussitôt pagodes et pagodines se mirent à chanter et à jouer des instruments; tels avaient des théorbes, faits d'une coquille de noix, tels avaient des violes, faites d'une coquille d'amande, car il fallait bien proportionner les instruments à leurs tailles: mais tout cela était si juste et s'accordait si bien, que rien ne réjouissait davantage que ces sortes de concerts.
Lorsque la princesse fut sortie du bain, on lui présenta une robe de chambre magnifique; plusieurs pagodes, qui jouaient de la flûte et du hautbois, marchaient devant elle; plusieurs pagodines la suivaient, chantant des vers à sa louange: elle entra ainsi dans une chambre, où sa toilette était mise. Aussitôt pagodines darnes d'atours, pagodines femmes de chambre, allaient et venaient, la coiffaient, l'habillaient, la louaient, l'applaudissaient, il n'était plus question de laideur, de jupe zinzolin ni de ruban gras.
La princesse était véritablement étonnée: «Qu'est-ce qui peut, disait-elle, me procurer un bonheur si extraordinaire? Je suis sur le point de périr, j'attends la mort, je ne puis espérer autre chose, et cependant je me trouve tout d'un coup dans le lieu du monde le plus agréable, le plus magnifique et où l'on me témoigne le plus de joie de me voir!» Comme elle avait infiniment de l'esprit et de la bonté, elle faisait si bien que toutes les petites créatures qui l'approchaient demeuraient charmées de ses manières.
Tous les jours à son lever, elle avait de nouveaux habits, nouvelles dentelles, nouvelles pierreries; c'était trop de dommage, qu'elle fût si laide: mais cependant, elle qui ne pouvait se souffrir, commença de se trouver moins désagréable, par le grand soin que l'on prenait de la parer. Il n'y avait point d'heures où quelques pagodes n'arrivassent, et ne lui rendissent compte des choses les plus secrètes et les plus curieuses qui se passaient dans le monde, des traités de paix, des ligues pour faire la guerre, trahisons et ruptures d'amants, infidélités de maîtresses, désespoirs, raccommodements, héritiers déçus, mariages rompus, vieilles veuves qui se remariaient fort mal à propos, trésors découverts, banqueroutes, fortunes faites en un moment, favoris tombés, sièges de places, maris jaloux, femmes coquettes, mauvais enfants, villes abîmées: enfin que ne venaient-ils pas dire à la princesse pour la réjouir ou pour l'occuper? Il y avait quelquefois des pagodes qui avaient le ventre si enflé et les joues si bouffies, que c'était une chose surprenante. Quand elle leur demandait pourquoi ils étaient ainsi, ils lui disaient: «Comme il ne nous est pas permis de rire ni de parler dans le monde, et que nous y voyons faire sans cesse des choses toutes risibles, et des sottises presque intolérables, l'envie d'en railler est si forte que nous en enflons, et c'est proprement une hydropisie de rire, dont nous guérissons dès que nous sommes ici.» La princesse admirait le bon esprit de la gente pagodine; car effectivement l'on pourrait bien enfler de rire, s'il fallait rire de toutes les impertinences que l'on voit.
Il n'y avait point de soir que l'on ne jouât une des plus belles pièces de Corneille ou de Molière. Le bal était très fréquent, et les plus petites figures, pour tirer avantage de tout, dansaient sur la corde, afin d'être mieux vues: au reste, les repas qu'on servait à la princesse pouvaient passer pour des festins de fête solennelle. On lui apportait des livres sérieux, de galants, d'historiques, enfin les jours s'écoulaient comme des moments, quoiqu'à la vérité toutes ces pagodes si spirituelles lui parussent d'une petitesse insupportable; car il arrivait souvent qu'allant à la promenade, elle en mettait une trentaine dans ses poches pour l'entretenir, c'était la plus plaisante chose du monde de les entendre caqueter avec leur petite voix, plus claire que celle des marionnettes.
Il arriva une fois que la princesse, ne dormant point, disait: «Que deviendrai-je, serai-je toujours ici? Ma vie se passe plus agréablement que je n'aurais osé l'espérer, cependant il manque quelque chose à mon cœur, j'ignore ce que c'est, mais je commence à sentir que cette suite des mêmes plaisirs, qui n'est variée par aucun événement, me semble insipide. - Hé ! princesse, lui dit une voix, n'est-ce pas votre faute? Si vous vouliez aimer, vous sauriez bien vite que l'on peut rester longtemps avec ce qu'on aime, dans un palais et même dans une solitude affreuse, sans souhaiter d'en sortir. - Quel pagode me parle? répondit-elle. Quels pernicieux conseils me donne-t-il, contraires à tout le repos de ma vie? - Ce n'est point un pagode, répondit-on, qui vous avertit d'une chose que vous ferez tôt ou tard; c'est le malheureux souverain de ce royaume qui vous adore, madame, et qui n'oserait vous le dire qu'en tremblant. - Un roi m'adore, répliqua la princesse, ce roi a-t-il des yeux? Ou s'il [n'] est aveuglé, a-t-il vu que je suis la plus laide personne du monde? - Je vous ai vue, madame, répliqua l'invisible, je ne vous ai point trouvée telle que vous vous représentez, et soit votre personne, votre mérite ou vos disgrâces, je vous le répète, je vous adore: mais mon amour respectueux et craintif m'oblige à me cacher. - Je vous en ai de l'obligation, reprit la princesse, que ferais-je, hélas ! si j'aimais quelque chose? - Vous feriez la félicité de celui qui ne peut vivre sans vous, lui dit-il, mais si vous ne lui permettez pas de paraître, il n'oserait le faire. - Non, dit la princesse, non, je ne veux rien voir qui m'engage trop fortement.» On cessa de lui répondre, et elle fut le reste de la nuit très occupée de cette aventure.
Quelque résolution qu'elle eût prise de ne rien dire qui eût le moindre rapport à cette aventure, elle ne put s'empêcher de demander aux pagodes si leur roi était de retour. Ils lui dirent que non. Cette réponse qui s'accordait mal avec ce qu'elle avait entendu l'inquiéta, elle ne laissa pas de demander encore si leur roi était jeune, et bien fait. On lui dit qu'il était jeune, qu'il était bien fait et fort aimable. Elle demanda si l'on avait souvent de ses nouvelles. On lui dit que l'on en avait tous les jours. «Mais sait-il, ajouta-t-elle, que je suis dans son palais? - Oui, madame, répliqua-t-on, il sait tout ce qui se passe à votre égard, il s'y intéresse, et l'on fait partir d'heure en heure des courriers qui vont lui apprendre de vos nouvelles.» Elle se tut et commença à rêver beaucoup plus souvent qu'elle n'avait accoutumé de le faire.
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